C’est trop dangereux en rue

On a à peine osé se coucher : les Allemands ont de nouveau bombardé durant la nuit.
La matinée, pourtant, reste calme. Il gèle fortement et le ciel clair attire plusieurs avions qui, près du Vieil-Dieu, larguent des bombes.

Dès midi, la cave à la brasserie Dumortier se remplit de civils. On finit par en interdire l’accès : on étouffe à force d’être serrés les uns contre les autres. Vers 16h30, un premier obus éclate. Le choc est effrayant. Les suivants s’enchaînent sans répit.
À un moment, des lueurs aperçues par les lucarnes laissent deviner un incendie dans la rue. On entend alors une pétarade ininterrompue : des cartouches qui éclatent. On comprend qu’une baraque brûle. Lorsque l’obus l’a frappée, le souffle a été si puissant que nous avons tous été secoués dans la cave.

Peu après arrivent les pompiers, aidés de soldats. C’est alors que survient le vicaire Banckaert, bouleversé : un officier vient de lui annoncer qu’il y a des blessés non loin d’ici.

Un obus, ayant traversé une véranda, a provoqué l’une des pires tragédies de ces derniers jours : chez Gathem, rue Neuve n°62, il a tué dix personnes dans la cave — des voisins et des membres de la famille.
Seul le douanier Decraemer, assis sur les marches de l’escalier, a survécu.
Par un malheureux hasard, les deux enfants Opsomer étaient allés à la boutique chercher du carbure. Valentine Capon, entendant les obus, leur avait dit : « Vous ne pouvez pas rentrer, c’est trop dangereux ». Elle les avait entraînés avec elle dans la cave… où la voûte s’est effondrée, ensevelissant dix des quatorze réfugiés.

Le carbure de calcium était utilisé dans les lampes à acétylène pour produire de la lumière. – Wikimedia Commons

Le service d’ordre est assuré par le garde et quelques soldats allemands.
Ils éloignent les civils restants et, peu après, la sonnette du garde réclame vingt hommes pour dégager les morts.

À l’époque, une rumeur se répand : un militaire aurait sectionné les doigts d’une victime pour prendre ses bagues.

Sources :

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