Bombardement de la gare de Comines

La nuit est d’une obscurité totale. Dans ce noir profond, les éclairs du front paraissent d’autant plus terrifiants. Par instants seulement, le canon et la fusillade troublent le silence. Vers une heure du matin, le canon allemand se met à bombarder avec insistance ; le sifflement des obus passe tout près, sinistre. On se réveille en sursaut, l’angoisse au ventre : les autres vont-ils répondre ?
Impossible ensuite de trouver le sommeil.
Vers treize heures quarante-cinq, les tirs ne viennent plus du mont Kemmel, mais de la direction de Warneton. C’est notre gare qui est visée. Les projectiles proviennent du Bizet-Ploegsteert — comme le confirmera, après la guerre, Monsieur Ch. Dewitte, curé du Bizet, à qui les Anglais confiaient souvent à l’avance leurs cibles.
Alors c’est la panique : on se précipite dans les caves, les coups tombent dru, toujours de la même direction, visant de nouveau la gare. Sauve-qui-peut dans tout le quartier ! Plusieurs familles s’abritent ensemble dans les caves voisines. Le bombardement dure environ une heure, parfois deux obus tombent en même temps.
Vers seize heures, on émerge, tremblants, pour constater les dégâts.
De nombreux carreaux sont brisés depuis la gare jusqu’à la maison Louis Bonte.
Quelques murs éventrés, toitures trouées, fils télégraphiques arrachés.
La gare de Comines Belgique est méconnaissable : rails tordus, poteaux couchés, hangars éventrés.
Le secteur entre le couvent des Sœurs d’Orléans et la gare a été touché.
Deux soldats allemands ont été tués, un autre blessé.
Deux civils ont également trouvé la mort, et un petit garçon, fuyant sans regarder, s’est fait écraser par une voiture.
Un homme aurait été fusillé.
À peine les premiers obus tombés, une attaque vive se déclenche vers Oosttaverne : le canon et la fusillade reprennent de plus belle. L’affrontement se poursuit jusque vers le soir, s’affaiblissant peu à peu.
Dans la nuit, on entend encore la fusillade vers Gheluvelt et le canon vers La Bassée.

Comines France, cette fois, semble épargnée.
Le départ du II.b.A.K. (2e Bataillon d’Artillerie de Campagne) est confirmé.