Le rationnement se poursuit pour les Cominois

Les nuits restent agitées, surtout après minuit. Le canon nous empêche souvent de dormir. Toute l’action semble désormais se concentrer vers Ypres.
Il est interdit d’arracher les pommes de terre, interdit aussi d’en vendre. Les marchandises envoyées de Gand, déjà chargées sur les wagons, sont déchargées et ne peuvent plus nous parvenir. Beaucoup de choses deviennent rares.
À Hooge, les combats continuent. Un soldat allemand déserte, à bout de force. Il raconte ce qu’il vit. Il ne supporte plus les affrontements atroces pour les mêmes morceaux de terrain. À Hooge, Zandvoorde et Hill 60, les hommes marchent sur les cadavres. Parfois, ils tombent sur des corps en décomposition qui cèdent sous leur poids. Lui-même s’endort un jour, épuisé, sur le corps d’un camarade mort. En avril 1915, il voit encore des cadavres de soldats tombés en octobre 1914.

Il ne peut pas se résoudre à passer un nouvel hiver au front, souvent debout dans l’eau jusqu’à la poitrine. Il en a assez. Il est aussi rongé par la peur d’être abattu par ses propres officiers, qui n’hésitent pas à tirer dans le dos de ceux qui refusent d’avancer. Et puis, il y a cette odeur insupportable des corps en décomposition. Il ne veut plus voir ça. Même s’il doit pour cela ne jamais revoir son pays.