Offensive allemande à Arras et en Champagne.

À Comines, les autorités imposent une nouvelle mesure : chaque habitant doit déclarer ses poules et ses lapins, sous peine d’amende. Une contrainte de plus qui pèse sur un quotidien déjà bien éprouvé.
La veille, vers vingt-deux heures trente, une violente attaque s’est déclenchée du côté de Gheluvelt. Les canons ont tonné jusqu’à minuit avant de céder la place à une fusillade nourrie. Le fracas résonnait jusque dans les caves où la population cherchait refuge.
Le commandant ordonne une enquête afin de vérifier si les caves disponibles suffisent à abriter les civils en cas de bombardement. Henry Dumortier, lui, s’adresse tour à tour à l’inspecteur de la brasserie et au bourgmestre : qui doit avoir priorité sur sa cave ? Les soldats ou les civils ? Les réponses divergent. L’un exige que la cave reste au service des troupes, l’autre rappelle que le drapeau rouge qui y est hissé la réserve aux habitants. L’incertitude demeure, ajoutant à l’angoisse.
Samedi dernier, la Ville a dû régler, par bons de Comines, la somme de 1.100 francs pour la reprise de l’installation des limonades. Le notaire en personne est venu au bureau conclure cette transaction.
Dans l’après-midi, Henry Dumortier se rend dans les quartiers de la Gaie Perche et de la « Crème ». La vision est désolante : maisons éventrées, vitres pulvérisées, toitures effondrées. C’est tout un pan de la ville qui porte les stigmates des bombardements.
Le soir, à l’appel, un civil belge nommé Médart, ivre, incite ses camarades à la rébellion et leur souffle de rentrer chez eux. Les gendarmes l’arrêtent aussitôt.
Pendant ce temps, le Canadien Herbert McBride quitte ses tranchées de Wulverghem avec ses hommes pour rejoindre Dranoutre en passant par Neuve-Église. Dans ce village marqué par les combats, ils croisent des réfugiés venus de l’est. Installés dans les maisons abandonnées qui tiennent encore debout, ces malheureux survivent tant bien que mal. Ils ont faim, ils ont froid, mais ne se plaignent pas. Les autorités françaises leur apportent une aide précieuse, tandis que les hommes s’emploient à réparer les routes et que les femmes se rendent utiles dans les blanchisseries militaires.

Neuve-Église est un village situé à la limite sud du saillant d’Ypres. Des panneaux de ce type étaient souvent installés dans les tranchées lors des attaques au gaz, lorsque le vent était favorable (généralement de l’est).
Sur le front, l’heure est à la contre-offensive : les Allemands lancent de nouvelles attaques en Champagne et à Arras.
