On prie

Il gèle très fort et le vent souffle du nord.
Les obus d’hier sont tombés derrière la gare, vers le Corentje et les Cinq-Chemins.
À tous les offices, on consacre la paroisse à la Sainte Vierge, à la demande d’un certain nombre de paroissiens, vu le danger toujours croissant qui menace Comines.

Toute l’après-midi, le monde se tient dans les caves : avec le temps clair, on craint les avions, mais, contrairement à hier, il n’en vient pas. On entend aujourd’hui le canon vers La Bassée et Gheluvelt.
Le receveur de la gare a pu évacuer avec ses meubles vers Wervicq ; la famille Vanneste aussi. Mais le mari ne pourra s’y rendre que du samedi au lundi. C’est dans cette maison que la Kommandantur va s’installer.
Le journal français Le Miroir raconte tragiquement une sorte de renversement : les avions français ont bombardé une usine de Dornach, près de Mulhouse, où étaient fabriqués les gaz destinés aux obus asphyxiants allemands. Quarante-deux ouvriers ont été intoxiqués, ainsi que le directeur et un colonel allemand chargé de la production. Une véritable hécatombe, touchant une population pourtant encore considérée comme française, que l’on prétend libérer si la guerre est gagnée.
La soirée se termine dans le calme.
